Petite, si tu es Kurde, écoute-moi Il faut partir et quitter ton chez toi Moi, j'ai connu ton sort, j'ai tutoyé la mort On n'a jamais raison contre un soldat Ils étaient 100 autour de ma maison Aux murs, y avait de l'ail et des poivrons Le vent était si doux, le ciel était si clair Et mon père est tombé dans un éclair C'était un matin calme de septembre Ils ont amené ma mère dans la chambre Grand-père, dans ses mains, pleurait comme un enfant Dehors, on entendait hurler Maman Grand-mère faisait du pain dans la cuisine Elle s'effondra, le nez dans sa farine Et sur son cœur éclot la fleur d'un géranium Dernier hommage qu'elle ait reçu d'un homme Grand-père, à coups de crosse dans le dos Implorait la pitié de ses bourreaux J'entendais les soldats qui riaient tant et plus Et Maman sur son lit ne criait plus Puis soudain, le soleil s'est endeuillé Les obus éclataient comme des œillets La mort faisait ripaille, jusque dans mon jardin Il n'y poussait plus que des orphelins La pluie qui avait cousu tout l'horizon Faisait fumer les ruines des maisons Et tout en m'éloignant du ciel de Babylone J'ai compris que je n'avais plus personne N'écoute pas les fous qui nous ont dit "La liberté est au bout du fusil" Ceux qui ont cru ces bêtises sont morts depuis longtemps Les marchands d'armes ont tous de beaux enfants Depuis la nuit des temps, c'est pour l'argent Que l'on envoie mourir des pauvres gens Les croyants, la patrie, prétextes et fariboles Combien de vies pour un puits de pétrole? Petite, si tu es Kurde, il faut partir Les enfants morts ne peuvent plus grandir Nous irons en Europe, si tel est notre lot Là-bas, ils ne tuent les gens qu'au boulot