Si l'on gardait, depuis des temps, des temps Si l'on gardait, souples et odorants Tous les cheveux des femmes qui sont mortes Tous les cheveux blonds, tous les cheveux blancs Crinières de nuit, toisons de safran Et les cheveux couleur de feuille morte Si on les gardait depuis bien longtemps Noués bout à bout, pour tisser les voiles Qui vont sur la mer Il y aurait tant et tant sur la mer Tant de cheveux roux, tant de cheveux clairs Et tant de cheveux de nuit sans étoiles Il y aurait tant de soyeuses voiles Luisant au soleil, bombant sous le vent Que les oiseaux gris, qui vont sur la mer Que ces grands oiseaux sentiraient souvent Se poser sur eux les baisers partis De tous ces cheveux Baisers qu'on sema sur tous ces cheveux Et puis en allés parmi le grand vent Parmi le grand vent Si l'on gardait, depuis des temps, des temps Si l'on gardait, souples et odorants Tous les cheveux des femmes qui sont mortes Tous les cheveux blonds, tous les cheveux blancs Crinières de nuit, toisons de safran Et les cheveux couleur de feuille morte Si on les gardait depuis bien longtemps Noués bout à bout, pour tordre des cordes Afin d'attacher à de gros anneaux Tous les prisonniers et qu'on leur permît De se promener au bout de leur corde Les liens des cheveux seraient longs, si longs Qu'en les déroulant du seuil des prisons Tous les prisonniers, tous les prisonniers Pourraient s'en aller jusqu'à leur maison Jusqu'à leur maison Si l'on gardait, depuis des temps, des temps Si l'on gardait, souples et odorants Tous les cheveux des femmes qui sont mortes Tous les cheveux blonds, tous les cheveux blancs Les liens des cheveux seraient longs, si longs Qu'en les déroulant du seuil des prisons Tous les prisonniers, tous les prisonniers Pourraient s'en aller jusqu'à leur maison Jusqu'à leur maison