Ici, le lac ressemble à la mer Les montagnes disparaissent parfois Sous une brume millénaire Sous un long manteau de froid Ici, les hommes pas peu fiers Livrent à la vigne un combat Pour mettre un éclair de lumière Sur la robe de cette liqueur-là Celle que l'on boit Quand vient le soir Qu'on se raconte les histoires Gorgées de soleil Celle que l'on boit Quand on ne pense plus à rien Qu'à cet arôme, à ce parfum Et advienne que pourra Sommeillant entre ciel et pierre Il flotte en ce village vaudois Encore un parfum d'après-guerre De Jean Villard et de Chasselas Assis à l'auberge de l'Onde Les hommes un instant seront frères Paressant à l'abri de ce monde "Patron, sers-nous encore un verre" Celui que l'on boit Que l'on tient dans nos mains Comme la coupe de tous les saints Même si on n'y croit plus Dieu, on n'y croit plus Depuis qu'en un jour de colère L'envoya grêle et tonnerre Et nos récoltes il dévasta C'est la nature, on ne peut rien contre ça Ici le lac joue à la mer Le ciel, si noir déjà Et cette beauté millénaire Aucun dieu, aucun roi Ne la tiendra prisonnière Je garderai ton mystère Ô Saint-Saph, je prête sarment, ô joie