En des temps où la vie n'était pas que bonheur C'est à dire en des temps que l'on connait encore Y vivait une fille au charme de la fleur à La fraîcheur de l'aube qui venait d'éclore Se tenant près du pré si prête à se prêter A des jeux auxquels nul n'aurait osé songer En ces temps agricoles elle n'avait qu'une idée Que celui qui s'y colle vienne l'agricoler En des temps où la vie connaissait le malheur C'est à dire en des temps que l'on ignore encore Y vivait une fille à la franche pâleur Au teint si terne que l'on devinait son sort Attenant au grand immeuble gris bétonné Elle échangeait son corps contre un peu de monnaie En ces temps d'industrie elle était épuisée De s'être sans répit industrialisée Moi jeune et de vie moins pleine De sa vie, l'on a su Qu'existait vraiment la peine Que la misère était bien dans nos rues Moi jeune et de vie moins pleine De sa vie, l'on a su Qu'existait vraiment la peine Aux recoins de nos rues En passant je la vis et je m'approchais d'elle Lui demandant le prix du forfait de son corps Mais c'est là qu'elle me fit - et me rendit fou d'elle Une réponse qui valait son pesant d'or Jugeant mon attitude un peu trop assurée Face à l'inexpérience dont je dégoulinais Elle lorgna d'abord mon allure débrayée Puis sans faire de détours se mit à me railler Elle me dit: "Tu n'es Qu'un jeune et sot garnement Je pourrais être trois fois celle Qui te fait office de maman Rentre donc un peu chez elle Et tu reviendras grand Quand la petite hirondelle Reverra le printemps Retournant chez ma mère, je revins aux beaux jours Quand s'est enfui l'hiver et que le bourgeon sort Mais à la place où je l'avais trouvée la veille Elle n'avait laissé que le vide et la mort Or inspectant les lieux avec circonspection Je ne trouvais pas trace de l'objet de passion Je fus un peu plus tard contraint de m'aviser Que tendre créature s'était virtualisée Me retrouvant ainsi seul Il ne me restait plus Qu'à prendre la plume Et coucher la douleur De ma voix jamais pu Aimer pour une seconde Un tout petit moment Celle qu'à présent j'appelle La femme aux mille amants En des temps où la vie fêtera le bonheur C'est à dire en des temps que l'on attend encore Il y vivra des filles des charmes et des fleurs et La fraîcheur de l'aube qui viendra d'éclore Il y vivra des hommes de l'amour de l'argent Il y vivra des femmes qui donnent des chants Des chants qu'on chante encore sans se lasser vraiment Et celui de la femme ayant eu mille amants En des temps où la vie fêtera le bonheur C'est à dire en des temps que l'on attend encore Il y vivra des filles des charmes et des fleurs et La fraîcheur de l'aube qui viendra d'éclore Il y vivra des hommes de l'amour de l'argent Il y vivra des femmes qui donnent des chants Des chants qu'on chante encore sans se lasser vraiment Et celui de la femme ayant eu mille amants.