Je m'imagine, tout en haut du belvédère Et même parfois encore plus haut Juste au dessus du château d'eau Je vois les champs délimités par les ronces Le parking de la supérette toujours à la même place Et les manouches qui portent péniblement leur cirrhose jusqu'au caddie Les rues grignotées par les agences immobilières Et tous ces mêmes lotissements, ces mêmes commerces, ces mêmes rond-points Qui mis bout à bout finissent par s'ériger en ville-témoin Tout cela est parfaitement bien huilé Paré pour une bonne campagne municipale Je me dis que tout est oublié Rio Baril Les gifles de l'instit contre le radiateur Les engueulades de réveillon Les menaces de BEP Les enfants que je n'aurai jamais Le job que j'ai perdu La mort de mon grand-père Et sa cicatrice sur le torse Le jour où j'm'suis rasé les couilles pour grandir Les bouches qui m'ont embrassé alors que j'voulais vomir L'année où j'ai cru que je me sortirai des griffes de cet animal poisseux et imprévisible qui me gangrène petit à petit Tout est fini Oublié Tout Sauf ce mercredi de mes 12 ans Et le match raté Dire qu'ils ont gagné la finale sans moi ...