"Dites a nos troupes qu'un festin les attend à Bagdad, Gaza, Tripoli ou Téhéran. Dites à la presse de titrer plus grand que l'avancée des chars se transfigure en art..." Stratèges de fer, futur de pierre Cliquetis des orfèvres, uranium aux lèvres Mécanique des conquêtes, grandes vannes ouvertes Huis-clos d'acide pour les prochains génocides Au comptoir du baril d'or noir, on graisse les abattoirs Et derrière chaque dune, des promesses brunes de fosses communes, Une corde chacune avant la pendaison de la lune Les potences ont souri, les cours boursiers aussi A l'envol premier des éperviers S'est avancé le printemps des bombardiers. Enfin La nuit a faim, elle s'étire, elle s'est mise à courir Patronnesse des rampes de tir Elle masturbe les obus et le temps C'est son chant qu'on entend C'est le sifflement dément des coalitions du sang Puisqu'ils sont le diamant au doigt de Dieu Puisqu'ils sont l'abreuvoir des peuples heureux Puisqu'ils sont le globe et l'atome, l'air et le sérum Et ce feu des grands ducs sur les rives des oléoducs A minuit l'égorgeur, rétine au viseur Et la rue prend l'odeur du sang frais sur la pierre A minuit l'égorgeur, rétine au viseur Et la rue prend à cœur de ne pas tomber la première Peux-tu voir la chair et l'ombre se mêler aux décombres Dans un tableau d'os et de peau au fond d'un puits sans eau? Peux-tu sentir monter les effluves de corps crevés Sous les brèches d'un jour muet à la faveur d'ailes d'acier Le temps d'un cri et d'un crime? Et un chapelet d'abîmes Aux yeux d'épines, et un silence aride, et l'alphabet du vide Entre les bras calcinés du premier enfant effacé Le temps d'un cri et d'un crime C'est l'heure anthropophage où les visages prennent l'âge des Cratères à fleur d'orage C'est le temps des fenêtres bouchées de terre verte C'est le brun clair sur des cimetières qui ne regardent plus la mer Écume funéraire d'un poumon privé d'air C'est le pays qui a le ventre ouvert C'est le pays qui a le ventre ouvert C'est le pays qui a le ventre ouvert... Il se peut que des chenilles s'enlisent et vrillent Au point précis où on rase Il se peut que s'embrasent ruelles et caveaux de sable Pour qui veut la preuve qu'un char est cassable Le oud et le violon ont cassé leurs cordes à l'unisson Parlent d'étrangler le colon Et la rue s'est mise à manier la langue des insurgés