Ils vendent tout Thomas Pitiot avec Loïc Lantoine Ils vendent les coquillages de bord de mer Comme ils ont vendu l'esu, Prêts à troquer leurs mères Ces salauds... Ils vendent le sable fin, les algues Et ils conviennent Pour s'enrichir de breveter Les couleurs et l'oxygène. Ils vendent aux plus offrants Mais n'offrent rien, jamais de cadeaux, Sauf pour un abonnement de bienvenu A tous leurs idéaux. Ils vendent les hymens de Jeunes vierges sur la planète Et les mains ouvrières De jeunes enfants analphabètes. Ils vendent tous les combats d'hier, Les acquis des grands-pères; Ils vendent ce qu'ils rejettent Et tous leurs déchets nucléaires. Ils vendent des dictatures Et de l'or noir dans les assiettes, Des mètres cubes d'air pur Ils ont décidé que ça s'achète! Ils vendent même le sacré, Le visage des guérilléros; Les slogans des révolutions En période de promo. Ils vendent les symphonies Aux opérateurs de mobile; Aux pays du Tiers-monde Ils vendent leurs vieilles automobiles, Ils vendent tous les progrès passés Et leurs vieilles maladies, Ne dévoilent jamais les secrets De leurs vieilles pharmacies. Ils vendent la solidarité, Les pièces jaune des grands-mères; Préfèrent la charité, Ont inventé l'humanitaire. Ils vendent coûte que coûte Tout ce qui leur coûte et même l'écoute; Vendent tous les engagements Même les mots, leur langage ment. Ils vendent à coup de publicité Des espoirs sans lendemains Au public des cités A qui ils ont liés les mains, Ils vendent la peau de l'homme Et bien avant de l'avoir tué; L'ours, le loup et l'orme Sont des espèces du temps passé. Ils vendent des marées noires Et sacrifient les littoraux; Dans l'arène des gueulards Ils vendent l'agonie des taureaux. Ils vendent de vieilles constitutions Aussi malades que leur système; Ils condamnent la contestation Dans des tribunaux qu'ils enchaînent. Ils vendent depuis toujours Le travail des travailleurs; Ont vendu nos vieux jours, Des mouroirs comme dernière demeure. Ils vendent l'idée laïque En dépeçant l'universel; Les clergés revanchards Sont toujours une bonne clientèle. Ils ont vendu la signification Du mot public, Celui qui s'oppose aux lois de l'argent Est archaïque. Ils vendent aux oreilles innocentes Que des chansons sans âme Pourvu qu'elles soient divertissantes, Ils endorment le quidam. Ils vendent au grattage, au tirage A la française des bœufs; On se gratte, ils nous tirent, Jamais d'affaire c'est pas du jeu. Ils vendent aux yeux bleus des mineurs Des poussières sans charbon; Ils percent au fond des cœurs Une existence sans fond. Ils vendent aux sans papier Des grillages sans les griots; Les marchands de barbelés Déménagent tous les idéaux. Ils vendent le devenir Des grands primates en liberté; Les forêts séculaires Y a plus d'endroits où se cacher. Ils vendent des armes A des culs-de-jatte fanatisés; Ils vendent des larmes A des orphelinats entiers. Ils vendent aux élites corrompues Le pouvoir d'informer, Des bouquets satellites Remplis d'épines empoisonnées. Ils vendent l'esprit critique A quelques philosophes mondains, Les chiens de garde de la pensée unique Aboient pour rien. Ils vendent des étiquettes Cousues à même la peau des gens; Leurs marques sont des tatouages Que l'on refuse aux indigents Ils vendent à nos consciences Un nouveau vocabulaire. Ne disent plus indigènes Mais parlent de main d'œuvre moins chère. Ils vendent des rallyes arrogants, Font le pari du Dakar; A chaque édition Des enfants écrasés par un char. Ils vendent leurs sommets capitaux En face des bidonvilles, c'est chic! Transforment une capitale Le temps d'un enjeu olympique. Ils vendent, ils crient Soldons!, Cédons!, Qu'importe les périodes, Ils ont même vendu les saisons! Ont vendu les organismes, Les cellules et les planctons... Ils ont même vendu les saisons! I yé duna gaagana...